FRIDA KAHLO /// La Chair Ouverte

Résumé :

L’article traite de l’engagement politique et du rapport d’identification de Frida Kahlo (1907-1954) avec des figures féminines fortes de la culture mexicaine, qu’elles soient légendaires ou historiques. Ce phénomène retranscrit dans ses peintures lui a permis d’explorer des thématiques telles que le corps des femmes, la condition des femmes ou encore le patriarcalisme oppressant. Elle a exprimé la souffrance des femmes lors de la perte d’un enfant, les femmes désespérées, les différentes sortes de blessures (celles du corps et celles des sentiments) à travers de nombreux autoportraits. Elle n’a pas hésité à puiser dans son expérience personnelle pour traiter de sujets considérés comme tabous dans les années 1930-1950, ce qui fait d’elle une artiste féministe précoce symbolisant le slogan américain prôné au début des années 1970 « Le personnel est politique ».

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Frida Kahlo (1907-1954) aujourd’hui considérée comme l’une des plus grandes créatrices de l’avant-garde mexicaine, s’est établie artistiquement entre 1920 et 1950. La construction d’une telle réputation internationale s’est notamment opérée grâce aux théories féministes actives depuis les années 1970 aux États-Unis. Les critiques féministes américaines ont permis une redécouverte quasi archéologique de son œuvre, ainsi qu’une relecture critique de son message pictural. Je voudrais me pencher particulièrement sur l’engagement politique de Frida Kahlo envers la cause des femmes au sein de son œuvre, mais aussi de sa vie qui a trop souvent été galvaudée dans de nombreux écrits.

L’artiste revendiquait la lutte des femmes au moyen d’une identification personnelle et multiple à des figures féminines légendaires issues de la culture mexicaine (populaire et religieuse). On ne peut pas vraiment parler de féminisme à proprement dit en ce qui concerne Frida Kahlo, il s’agit plutôt d’une conscience précoce de la situation des femmes dans une société patriarcale et oppressante. Oriana Baddeley a écrit à ce propos : « son œuvre illustre parfaitement les débats qui concernent les exclusions traditionnelles de l’art des femmes.

La fascination pour les fonctions du corps, les analogies entre les processus créatifs artistiques et physiques, l’autoportrait utilisé pour révéler le corps de la femme comme le site du discours esthétique patriarcal »1. L’article féministe pionnier traitant de l’art de Frida Kahlo est signé par Gloria Orenstein (professeure spécialisée dans la littérature comparative et l’étude du genre à l’université de Californie du Sud), qui, dès 1973, s’est attachée à une reformulation des interprétations de l’œuvre de Frida Kahlo. Elle publia « Painting for Miracle », dans The Feminist Art Journal, proposant une réinterprétation critique de la production plastique de l’artiste. L’auteure a particulièrement insisté sur le caractère innovateur et transgressif de l’art de Frida Kahlo. Dans son article, Orenstein remarque que Kahlo est l’une des premières artistes femmes qui a su oser peindre le sang menstruel – ce sang habituellement non représentable car associé à l’impureté et à la salissure. Gloria Orenstein relève le lien profond entre l’œuvre et les problématiques liées au corps des femmes (ses changements naturels, ses blessures et ses défaillances), problématiques actives dans l’art de Frida Kahlo, notamment à partir des années 1930. Les tabous devant jusqu’ici rester confinés dans le silence, le domaine du privé, sont mis au jour dans la peinture de Frida Kahlo, montrant un engagement précoce de sa réflexion sur le corps féminin. De manière plus précise, Kahlo a utilisé son corps, son intimité et son expérience biologique, comme un site d’expérimentation et d’auto-analyse. Selon Gloria Orenstein, l’artiste se servait de son propre corps pour s’exprimer visuellement sur la condition des femmes en général : elle se considérait alors comme un « porte-parole » du domaine privé, de l’univers domestique traditionnellement clos et silencieux. Orenstein illustre ses propos au moyen d’un examen relativement poussé de la peinture intitulée Henry Ford Hospital (1932). La peinture, qui traite de la fausse-couche et de ses répercussions physiques et psychologiques, met en exergue une expérience corporelle et culturelle vécue par Frida Kahlo elle-même et par de nombreuses autres femmes.

La suite de l’article ici :  http://genrehistoire.revues.org/index237.html.

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