Arlette Simon observe et s’imprègne des mouvements perceptibles dans la nature. Un bloc de terre qui s’affaisse, un ruisseau gelé, l’écorce trouée d’un arbre, une feuille percée, une pierre polie. Le temps et les saisons modèlent et transforment les éléments qui constituent un paysage. Aux mouvements de la nature s’ajoutent les mouvements des corps : un genou plié, un bras tendu, un pas chassé, un croisement de jambe, une nuque penchée, un saut dans les airs. Ainsi, l’artiste hybride une somme de mouvements expérimentés ou étudiés. La série desPercées (2013) est nourrie d’une gestuelle dansante et généreuse. L’artiste s’empare de plaques de grès blanc qu’elle découpe, modèle, plie et assemble. L’agencement des volumes crée l’apparition de trouées, de plis et de rondeurs. Les émaux aux teintes métalliques accentuent l’impression extra-terrestre de ces corps en mutation. La terre pliée et scintillante nous rappelle le drapé d’un épais tissu ou encore l’apparence d’une feuille de tôle courbée et déformée. Les formes tubulaires génèrent une dynamique. Elles circulent entre le socle et le reste de l’espace. Les mouvements sont libres, incontrôlables.
Au fil du temps les postures se resserrent, elles sont progressivement ramenées vers le sol. Catwalk (2013) ou Entrechat Bleu(2013) annoncent la dimension tellurique et grouillante des Lisières (2014). Les larges tubes de terre cuite font place à une multitude de colombins longilignes articulés les uns contre les autres. Directement extrudés des blocs de terre et non remodelés, ils colonisent l’espace et forment des silhouettes troublantes. Si l’évocation des viscères est immédiate, les vaisseaux de grès s’apparentent aussi au monde végétal, animal et minéral. La frontière est volontairement brouillée pour ouvrir l’imaginaire vers une expérience perceptuelle et sensorielle où le vivant nous est présenté comme étant imprévisible, étrange et impénétrable. Leurs silhouettes convoquent aussi bien l’excroissance que la profondeur, le visible et l’invisible. Un jeu de textures est produit par l’alternance des effets. La peau extérieure des tubes est brute, tandis que leurs intérieurs sont finement émaillés. Ainsi, Arlette Simon invite le regardeur à tourner autour de ses volumes, à pénétrer de son œil leurs entrailles insondables. Entre l’excès et l’intime, l’artiste explore des mouvements imperceptibles, habituellement cachés sous l’eau, dans la terre ou dans le corps. Les volumes protéiformes évoluent aux lisières de territoires à la fois séparés et complémentaires où le vivant s’exprime avec désinvolture et infinitude.
CATALOGUE /
LES ROCHES Espace d’Art Contemporain /
Exposition Atsunobu Kohira : Pérennité passagère, commissaire de l’exposition Leïla Simon.
Exposition Arlette et Marc Simon : A la lisière
Expositions ouvertes tous les jours de 15h à 19h du 15 juin au 31 août.
+ ARLETTE SIMON / http://www.eaclesroches.com/arlette-simon/