[PUBLICATION] Chloë Saï Breil-Dupont – Hidden Place /// Prix Jean-François Prat – 2021

Cobalt mystique, portrait of Yann (detail) , Oil on canvas , 75″ x 55″ , 190cm x 140cm , 2021

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Chloë Saï Breil-Dupont

Hidden place

Julie Crenn

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We go to the hidden place
That we go to the hidden place
We go to the hidden place
We go to a hidden place

Björk – Hidden Place (2001)

Chloë Saï Breil-Dupont peint des portraits. Sur la toile, elle représente à l’huile ses ami.es, les personnes avec qui elle vit ou a vécu un temps. Chaque œuvre résulte d’une relation intime, de conversations au long cours. On n’existe pas de la même manière avec une autre personne, puis une autre et encore une autre.[1] Ces relations plurielles participent de ce qu’elle est. Elles nourrissent ses réflexions à propos des systèmes de représentations, de l’art ou des structures sociales (réelles et utopiques) à l’intérieur desquelles ielles voudraient exister.

L’artiste, qui a vécu en France, au Brésil, en Italie ou en Allemagne, s’approprie les codes et les techniques d’une histoire de l’art à la fois classique et décloisonnée. Ainsi, elle revisite l’art flamand ou les peintres de la Renaissance italienne et crée des basculements temporels entre ce qui a été et le présent. Son exploration technique et visuelle peut être envisagée comme un contrepoint au flux visuel que nous connaissons depuis longtemps maintenant. Chloë Saï Breil-Dupont prend le temps de peindre les corps de ses ami.es. L’huile et le glacis lui permettent de « remettre du précieux » à leur peau, du sacré à leur visage et leur regard. D’ailleurs, pour ses œuvres les plus récentes, l’artiste rejoue le regard de la Joconde – le regard de la peinture qui poursuit le nôtre. Celle ou celui qui regarde existe autant que celle ou celui qui est peint.e et celle qui peint.

Leurs mains serrent contre leurs bustes des petits blocs d’images que l’artiste nomme des cassettes. Ce sont des arrêts sur images de films, de peintures, d’évènements. Entre ex-voto et images instagram, elles constituent une mémoire partiellement mise en partage. Le geste est trouble. Il retient une forme d’intimité, autant qu’il en dévoile des extraits. Ce même geste, celui de retenir de ses mains contre soi, manifeste une pudeur, une volonté de raconter quelque chose de soi, de l’autre. Les cassettes extériorisent ce qui est enfoui en nous, les fantômes, les choses invisibles, de celles qu’ils nous sont difficiles à dire, et peut-être plus faciles à représenter. Elles se passeraient de nos commentaires. Elles visibilisent tout ce que l’apparence dissimule. Alors les portraits s’inscrivent dans une histoire aussi ancestrale qu’actuelle – la pâte noire –  dans laquelle l’artiste fouille avec une grande délicatesse des corps-mémoires.


[1] Les citations de l’artiste sont extraites d’une conversation téléphonique qui s’est tenue le 12 mars 2021.

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