En 2012, Marianne Maric s’installe à Sarajevo pour une résidence pas comme les autres. Si elle n’a plus aucun souvenir de la ville, du pays, des paysages, elle partage pourtant un lien douloureux avec l’Ex-Yougoslavie. Avec la complicité de Pierre Courtin, directeur de la galerie Duplex / 10m² à Sarajevo, elle apprivoise une histoire complexe. Elle a souhaité se rendre se place pour se confronter à son histoire, celle de sa famille (son père est né à Kupres, un village serbe de Bosnie) et plus particulièrement celle de Yéléna, sa sœur. À 16 ans, Yéléna quitte l’Alsace et sa famille pour tenter sa chance à Paris. Elle est grande, brune, les yeux verts, on lui propose de devenir mannequin. Huit ans plus tard elle meurt violemment. Sa perte engendre un silence que l’artiste a voulu briser par l’image, le voyage et la rencontre. Elle marche sur un fil, celui de son histoire pour tenter de recoller les morceaux avec elle-même. En Bosnie, elle rencontre des jeunes femmes qu’elle photographie. Au départ, de sont des femmes sans têtes, sans identité. Elle poursuit le non-souvenir de Yéléna. Aujourd’hui, les visages apparaissent, l’apaisement se produit. Ainsi, Marianne Maric associe la femme-objet, la marche (mannequin, militaire, mémorielle) et la cicatrice en télescopant son histoire avec celle d’une région traumatisée par des décennies de dictature et par une guerre fratricide. Elle photographie les filles, l’architecture, la nature, la ville marquée par la violence (les obus tombés du ciel ont imprimé sur l’asphalte des empreintes en forme de fleurs que les habitants ont peint en rouge, les Roses de Sarajevo). L’artiste observe les traces d’un passage violent sur un pays en reconstruction, tout en recherchant les fondations de sa propre histoire. Les mémoires sont morcelées, il s’agit alors, par la production d’images, de réconcilier les histoires et les êtres, de combler les fissures. En activant une marche à la fois initiatique et libératrice, l’artiste part se confronte aux souvenirs pour créer sa propre histoire, ses images empreintes de fragilité, d’insolence et d’innocence en sont les nouvelles traces.
Marianne Maric / http://mariannemaric.tumblr.com/
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