ZOULIKHA BOUABDELLAH /// Branded #7

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Depuis le début des années 2000, Zoulikha Bouabdellah construit une œuvre protéiforme (vidéo, photographie, installation, sculpture) motivée par une réflexion sur l’identité culturelle et sexuelle. Ainsi, elle adopte les clichés sexistes, les normes patriarcales et les diktats moralistes pour les adapter à un discours politique. En ce sens, elle s’inscrit pleinement dans l’héritage des artistes ayant mis en avant une conscience féministe et postcoloniale. Des artistes, qui, avec une même volonté, ont lutté et continuent de lutter contre toute forme d’exclusion (raciale, sexuelle, religieuse, géographique). Zoulikha Bouabdellah s’intéresse plus spécifiquement à l’image et aux rôles attribués aux femmes tant au sein des cultures orientales qu’occidentales. En 2003, elle se fait remarquer avec la présentation d’une œuvre vidéo intitulée Dansons. L’artiste se filme exécutant une danse du ventre. Au moyen d’un cadrage resserré, la caméra est orientée uniquement sur le bassin. Elle ne porte pas une robe traditionnelle orientale, mais un drapeau français formé de trois foulards, bleu, blanc et rouge. Sur les foulards sont cousus des cliquetis qui viennent rythmer la danse de l’artiste. En fond sonore est diffusée La Marseillaise. L’Orient qui danse sur l’Occident pour le bousculer dans ses préjugés. Dansons au lieu de Marchons.

Courtesy Galerie Anne de Villepoix, Paris

Courtesy Galerie Anne de Villepoix, Paris

Zoulikha Bouabdellah joue avec les codes et les symboles culturels à travers une œuvre souhaitant le dépassement de ces symboles qui sont souvent étouffants. Un travail qu’elle poursuit avec la série Ni, ni, ni (2007), formée de trois portraits de l’artiste, qui, munie d’une couscoussière, dissimule ses yeux, sa bouche et ses oreilles. La femme y est privée de ses droits fondamentaux : la vue, la parole et l’écoute. De son point de vue, les femmes sont réduites aux rôles de mères, d’épouses et de maîtresses. Elles sont soumises à un système patriarcal qui les réduit à des objets. C’est ainsi que les représentaient les peintres et les écrivains orientalistes du XIXème et du début du XXème siècle. Dans un élan déconstructeur, l’artiste s’approprie la figure de l’odalisque : une femme nue, lascive, dotée de formes généreuses, installée à l’abri des regards dans une chambre richement parée. Elle s’empare de reproductions de peintures présentant des odalisques et des nymphes. Les posters sont découpés et recomposés. Ainsi les corps nus et les visages souriants sont associés aux motifs ornementaux issus de l’architecture arabe. De même, elle met en regard les odalisques « historiques » avec les nouvelles odalisques. Elle réalise des collages à partir de photographies prélevées sur les pages de magazines pornos. L’enchevêtrement des corps dénudés est recouvert par des motifs d’entrelacs qui rappellent ceux des moucharabiehs. Voir, sans être vu. Sans imposer une vision univoque, l’artiste associe les contraires. Ainsi, les silhouettes de mosquées sont teintées de couleurs pop (Pop Mosques – 2014), les contours d’un avion Mirage forment des motifs orientaux (Mirage – 2011), des sous-vêtements scintillants sont disposés au-dessus de hijabs (Le Rouge et le Noir – 2008). Zoulikha Bouabdellah structure une réflexion où la tradition tutoie la transgression pour faire jaillir une position critique. Son œuvre manifeste, Silence (2008), concentre l’ensemble de ses problématiques. Dans l’espace d’exposition sont étendus des dizaines de tapis de prières, dont les centres sont découpés. À l’intérieur, trônent fièrement des paires d’escarpins dorés ou argentés. Le geste est audacieux et radical, la lecture en est éclatante : les femmes, placées au centre de la réflexion, retrouvent leur voix, leur présence et leur liberté. Munie de couleurs, de paillettes, de symboles forts, de motifs séducteurs et d’un lexique mêlant poésie et politique, Zoulikha Bouabdellah dénonce non seulement l’oppression subie par les femmes, mais aussi la pauvreté d’une pensée unique nourrie de clichés médiatiques, intolérants et réducteurs.

Courtesy Galerie Anne de Villepoix, Paris

Courtesy Galerie Anne de Villepoix, Paris

Courtesy Galerie Anne de Villepoix, Paris

Courtesy Galerie Anne de Villepoix, Paris

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BRANDED / http://www.branded.fr/

+ Zoulikha Bouabdellah / http://zoulikhab.com/

++ Galerie Anne de Villepoix / http://www.annedevillepoix.com/fr/artistes/oeuvres/52/zoulikha-bouabdellah

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