EXPOSITION [Commissariat] /// DEPAYSEMENTS /// Ecole Nationale Supérieure d’Art et de Design de Nancy

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Aurélie Ayub – Nicolas Bibette – Simon Boutelou – Marine Calamai – Laetitia Chamoin – Elina Chared – Aude Couvercelle – Alix Desaubliaux – Julie Deutsch – Athénais Didierjean – Manon Dumont –  Cyril Duret – Ludovic Landolt – Dori Lee – Bruno Marinelli – Daisy Muller – Margot Robert – Florian Thomas & Cyril Fauchet.

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 L’habitation concerne l’ensemble, fécond, intime, continu, des êtres et des choses qui constituent les paysages et les lieux, qui relient l’une à l’autre la nature et la culture dans le temps.

Martin Heidegger – Bâtir habiter penser (1951).

Depuis quelques années je travaille et discute avec les étudiants des différentes écoles d’art en France, en tant qu’intervenante dans le cadre de rencontres et de workshops, ou bien en tant que membre des jurys pour les mémoires et les diplômes. Je m’étonne de la récurrence du paysage dans leurs pratiques. Une récurrence que j’assimilais à une volonté supposée de s’extraire de l’Histoire et des questions sociales et politiques, du réel. C’est à partir de ce constat, de ce malentendu, que j’ai souhaité proposer Dépaysements, une exposition collective réunissant des œuvres inédites réalisées par les étudiants de cinquième année de l’École Supérieure d’art et de design de Nancy.

Ludovic Landolt / Paysage enfilé, les passions d'une nation - 2016

Ludovic Landolt / Paysage enfilé, les passions d’une nation – 2016

Qu’est-ce qu’un paysage ? Comment le voir, le percevoir, le représenter ? Que nous dit-il ? Comment le penser, l’appréhender et agir en son sein ? La définition commune borne le paysage à « cette portion de terrain ou de décor que l’œil peut embrasser d’un seul coup. » Une définition pragmatique et rationnelle qui échappe à tout un pan de l’histoire de l’art. Depuis le XVème siècle le paysage est un genre artistique à part entière, les exemples sont nombreux et pluriels. Ses traductions et transpositions semblent infinies, il ne peut alors pas être réduit à l’image d’une montagne en arrière-plan, d’un ciel nuageux, d’un arbre en fleurs ou d’une vue sur la mer. Le sujet est bien plus vaste. C’est ce que John Wylie, professeur de géographie culturelle à l’université d’Exeter, explique dans son ouvrage Paysage – Manières de voir (2015), où le paysage est analysé comme un sujet en proie à différentes tensions. Ces tensions motivent la création (visuelle, plastique, littéraire, musicale, architecturale, etc.). En résumant l’étude de Wylie, le paysage peut être envisagé de l’intérieur et de l’extérieur. Deux points de vue s’opposent et engendrent un ensemble d’antagonismes tels que la proximité et la distance, l’expérience et le contrôle, l’habitat et la séparation, l’abstraction et la figuration, le son et le silence, le corps et l’esprit, le sensoriel et la cartographie, la subjectivité et l’objectivité. Ces différentes manières de voir et de comprendre le paysage sont dues à notre culture, notre éducation et aux systèmes d’ordonnance visuelle qui régissent notre façon d’être au monde. « Le paysage n’est pas seulement quelque chose que nous voyons, c’est aussi une manière de voir les choses, une façon particulière de regarder et de représenter le monde qui nous entoure. Les paysages ne relèvent pas seulement de ce que nous voyons, mais de la façon dont nous les regardons ».[1]

Julie Deutsch - Borders - 2016

Julie Deutsch – Borders – 2016

Les différentes œuvres, réalisées à l’occasion de l’exposition Dépaysements, comportent une volonté commune de défier une définition rigide et restrictive du paysage pour amener le spectateur-acteur à son tour à s’en emparer, à l’interpréter et à le comprendre de son propre point de vue. Par le son, la peinture, la sculpture, la photographie, le dessin, le jeu vidéo, la gravure ou encore la performance, les étudiants s’emparent du paysage en l’intégrant à leurs propres préoccupations. Qu’il soit sensoriel, visuel, en volume, fragmenté, insaisissable, physique, il est travaillé comme une matière et compris comme un territoire poreux et malléable qu’ils manipulent, étirent, ouvrent, contredisent et renversent. Si traditionnellement le paysage comporte une vision mélancolique, romantique, pittoresque ou exotique, il est ici question de corporéité, de métaphore, de fiction, de politique, d’illusion et d’expérience. Leurs œuvres mènent à une redécouverte d’un sujet à la fois classique et inépuisable. Dépayser c’est troubler quelqu’un, le désorienter en le changeant de milieu et en le mettant dans une situation qui lui donne un sentiment d’étrangeté. Par extension, Les œuvres engagent une pratique du dépaysement nous invitant à nous défaire de postulats confortables nourris d’habitudes et de certitudes que seul l’art peut ébranler.

Julie Crenn, décembre 2015.

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[1] WYLIE, John. Paysage – Manières de voir. Actes Sud / ENSP, 2015, p.23.

Margot Robert / Stratosphère ou Au delà des ombres - 2016

Margot Robert / Stratosphère ou Au delà des ombres – 2016

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Dépaysements /// du 3 au 5 février 2016

Vernissage le 3 février 2016 à 16

Exposition conçue dans le cadre d’un workshop avec les étudiants de 5e année de l’Ecole Nationale Supérieure d’Art et de Design de Nancy.

Ecole Nationale Supérieure d’art et de Design de Nancy

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